VOYAGE AU MAROC Charme mystérieux aux portes de l'Europe

LE MAROC situation géographique suite

L'arabe classique est enseigné en raison de 11 heures/semaine pour les deux premières années du premier cycle fondamental, puis de six heures/semaine pour les trois autres années et tout le deuxième cycle fondamental. Au cycle secondaire, l'enseignement de l'arabe classique occupe généralement deux heures/semaines pour les filières scientifiques et cinq heures/semaine pour les filières littéraires.

Pour ce qui est du berbère, il a toujours été interdit d'en faire usage dans les écoles depuis l'indépendance. Mais les autorités pédagogiques régionales peuvent, «si besoin est», entrevoir des consignes sur 'enseignement de l'amazigh «comme outil d'enseignement». Les négociations sur le statut de l'amazigh comme langue d'enseignement sont encore en cours et paraissent difficiles. Les objectifs pédagogiques visent, pour le moment, l'assimilation linguistique à l'arabe. Cependant, l'enseignement de l'amazigh peut être autorisé «comme matière» à raison de trois heures par semaine.

Il n'existe pas de dispositions juridique réglementant l'enseignement universitaire. Le service juridique au sein du ministère de l'Enseignement supérieur ne dispose d'aucun document contenant des lois réglementant la langue d'enseignement au supérieur. Toutefois, la pratique réelle est de continuer de respecter les directives du décret no 2-78-452 du 4 octobre 1978 portant réforme du régime des études et des examens en vue de la licence en droit (article 8):

Article 8

1) La langue d'enseignement est la langue arabe. Toutefois, à titre transitoire, l'enseignement sera organisé également en langue française. Quant aux disciplines de droit musulman (introduction à l'étude du droit musulman, statut personnel, théorie générale et sources, successions et immeubles non immatriculés), elles sont obligatoirement enseignées en langue arabe.

2) Pendant l'application du régime provisoire, l'étudiant doit faire connaître, lors de son inscription en première année du premier cycle, son intention de suivre les cours en langue arabe ou en langue française. Ce choix est irrévocable, l'étudiant est tenu de participer aux séances de travaux dirigés et de présenter les épreuves écrites et orales dans la langue d'enseignement qu'il aura choisie.

3) Pendant l'application du régime transitoire, l'autorité gouvernementale chargée de l'enseignement supérieurs fixe, au début de chaque année universitaire, après avis du conseil de faculté, la liste des disciplines qui seront enseignées en langue arabe.

4) La discipline de terminologie juridique est enseignée en langue française pour les étudiants qui ont choisi de suivre les cours langue arabe; elle est enseignée en arabe pour les étudiants qui ont choisi de suivre les cours en langue française.

Comme il fallait s'y attendre, le système qui devait rester «transitoire» est devenu permanent. Dans les faits, les sciences humaines, à l'exception du droit, sont généralement dispensées en arabe classique, les sciences (dont les sciences médicales) et les techniques, en français. Sans qu'il n'y ait de règle précise à ce sujet, c'est le professeur qui choisit sa langue d'enseignement, normalement le français. Les élèves connaissant déjà dans quelle langue enseigne le professeur ont ainsi toute la liberté de choisir leur langue d'enseignement. En réalité, il faut bien l'admettre, l'arabisation dans les universités a été grandement ralentie, sinon arrêtée, depuis que les étudiants se sont révoltés parce que leurs diplômes arabes ne leur offraient pas les mêmes débouchés que les diplômes «français» sur le marché du travail. Quant à l'anglais et les autres langues, il s'agit de matières enseignées parmi bien d'autres.

Un mot sur l'enseignement privé au Maroc. Ce secteur connaît une forte expansion depuis plusieurs années. Pour l'État, il convient de déployer tous les efforts nécessaires pour encourager les investissements privés dans ce secteur. Toutes les mesures nécessaires ont été prises pour améliorer la pertinence des apprentissages dans les établissements d'enseignement privé et stimuler ainsi la demande sociale pour l'accès à ce type d'enseignement. En fait, les Français sont entrés en force dans le secteur privé. Or, dans ce secteur, c'est l'unilinguisme français qui règne. On y compte des dizaines de lycées français très recherchés par les classes marocaines aisées; pour un non-Français, les frais de scolarité de ces écoles demeurent hors de prix. Dans l'enseignement du français, ces établissements sont tenus de respecter les horaires minimum de l'enseignement public, mais ils sont libres de les augmenter. Quant aux programmes, ils ne sont aucunement obligés de respecter ceux de l'enseignement public. C'est pourquoi la quasi-totalité des établissements de haut standing appliquent les programmes de la Mission française et utilisent des manuels officiels de l'enseignement français. Il existe également au Maroc une université privée: il s'agit de l'université Al Akhawayne. Dans cet établissement supérieur, la plupart des matières y sont enseignées en anglais.

Enfin, dans le domaine des langues étrangères, les langues les plus répandues sont l'anglais et l'espagnol, mais aussi l'allemand. Dans les cycles primaire et moyen, leur enseignement est considéré comme «une activité parascolaire»; il devient obligatoire lors du cycle secondaire où sont aussi enseignés l'allemand et l'italien.

4.3  La publicité et l'affichage
La vie économique au Maroc est véhiculée en trois langues: l'arabe dialectal (oral), l'arabe classique (écrit) et le français (oral et écrit). En ce qui a trait à l'affichage et à la publicité commerciale, la presse a souvent fait écho dans le passé à la trop grande importance accordée à une langue étrangère: le français. Dès 1973, le journal L'Opinion (7 mai 1973) rappelait l'existence des arrêtés municipaux qui prescrivaient l'arabe sur toutes les enseignes commerciales et les autres affiches publiques. Or, ces arrêtés n'ont jamais été appliqués très rigoureusement. De plus, ils n'ont été appuyés par aucune véritable législation de la part du Parlement.

Aujourd'hui, l'usage le plus courant est d'utiliser le bilinguisme français-arabe dans l'affichage en général, notamment dans la signalisation routière, laquelle accorde une certaine prépondérance à l'arabe dont les inscriptions sont placées au-dessus du français. Dans la publitié commerciale, les inscriptions bilingues accordent souvent la priorité au français, quand elles ne sont pas exclusivement en français, surtout dans les villes, ce qui suscite parfois des protestations de la presse. L'unilinguisme arabe est tout de même relativement fréquent, alors que l'unilinguisme français demeure très courant, surtout celle destinée aux touristes et aux produits de consommation. Comme l'unilinguisme français est plus fréquent que l'unilinguisme arabe, cela revient à accorder une certaine prépondérance au français écrit.

En fait, seul l'affichage officiel de l'Administration marocaine paraît systématiquement en deux langues. Il s'agit principalement des édifices gouvernementaux et municipaux, de la signalisation routière et des noms de rues. Au plan visuel, le Maroc semble un État officiellement bilingue (arabe-français). La toponymie est soit française, soit arabe, soit bilingue (avec préséance en arabe). Toutefois, dans certains cas, l'arabe est seulement utilisé dans l'affichage commercial et dans de rares panneaux de la signalisation routière (comme le STOP, QIF en arabe signifiant «stop»). En somme, la situation du Maroc ressemble à celle de la Tunisie où le bilinguisme est généralisé, mais la place du français est encore plus importante au Maroc.

4.4 Les médias

Bien que les journaux en langue arabe (classique) soient relativement nombreux, il n'en demeure pas moins que les médias marocains sont très influencés par le français, surtout dans la presse écrite. En effet, la liste des journaux publiés en français, même avec des noms arabes, sont très nombreux, que ce soit pour la presse partisane (L'Opinion, Libération, Albayane, Al-Maghreb, Le Quotidien du Maroc, etc.), la presse d'information générale (Le Matin du Sahara, Les Échos africains, Maroc-Hebdo International, Al-Mahjar, Le Courrier de la Nation, Tidmi, Le Temps du Maroc, Le Courrier africain, Le Quotidien du Maroc, Al Assas, Al Wassit Magazine, Le Musulman, Maroc actuel, etc.), la presse d'informations régionales (La Dépêche de Tanger, Les Échos du Sud, Le Message de Marrakech, La Tribune de Meknès, Nouvelles d'Essaouira, etc.), la presse d'informations économiques (Ecomap, Maroc-Business, Revue marocaine de finances publiques et d'économie, Info-Magazine, Banques et entreprises au Maroc, Le Guide du consommateur, Le Journal de vos vacances, La Gazette du tourisme, Revue marocaine des marchés publics, etc.), la presse scientifique (Espace infirmier, Espérance médicale, Bulletin de la Fédération marocaine pour la santé mentale, Revue marocaine d'odontologie, Revue marocaine de psychiatrie, etc.), la presse culturelle (Maroc-Europe, L'Étudiant marocain, Art et Cultures, Planète Magazine, etc.), la presse publicitaire (Tanger News, Al Barrah, Éclair Annonces, Le Journal des bonnes affaires, etc.), la presse sportive (Balle Green Set, Tanger Sport Magazine, Golf Maroc Magazine, La Gazette du sport, etc.), la presse féminine (Farah Magazine, La Citadine, Femmes du Maroc, etc.), et encore bien d'autres.

Pour la presse électronique, l'arabe est davantage présent. Pour la télévision locale, TVM (Télévision marocaine) et 2M (Deuxième chaîne marocaine) diffusent en arabe, mais partiellement en français. Les télévisions francophones sont TV5, La 5, Arte, EuroNews, Canal + Horizons, Eurosport, MCM International (français-anglais), Canal France International (français-arabe-anglais). Les bulletins de nouvelles à la télévision nationale sont en arabe et en français (en alternance).

La radio est généralement diffusée en arabe classique, en arabe marocain, en français, en anglais et en espagnol. Par exemple, RTM Chaîne Internationale/Rabat est partiellement francophone avec 16 heures de transmission en français par jour (français: 16,2 %; arabe: 81 %; espagnol: 1,2 %), Médi 1 (Radio Méditerranée Internationale)/Tanger) est partiellement francophone avec un nombre d'heures de transmission total est de 21 heures dont la moitié est française, Radio FM Casablanca, partiellement francophone avec 17 h de transmission/jour, Radio Monte Carlo est entièrement francophone (24h/24h), de même que France Inter (24h/24h), mais Radio France Internationale diffuse en français, en arabe et en anglais. L'une des stations de radio marocaines émet en amazigh durant douze heures par jour, mais elle est diffusée sur ondes courtes, donc peu accessible.

5 La politique linguistique à l'égard du berbère (amazighe)

La politique linguistique d'arabisation laisse peu de place à la berbérophonie. Les Berbères, qui constituent au moins 25 % de la population marocaine, appuient le gouvernement dans sa politique de pragmatisme et de cohabitation linguistique avec le français, mais l'arabisation est un couteau à deux tranchants, car elle se fait toujours aux dépens du berbère. Jusqu'à tout récemment, l'arabisation excluait automatiquement la langue berbère, puis le discours politique a commencé à changer, car le gouvernement ne peut pas ignorer les 25 % de berbérophones. Certains faits laissent croire que les Berbères entendent bien ne pas laisser mourir leur langue.

5.1 Les associations berbères

Les associations berbères se sont multipliées au Maroc et la langue berbère, totalement ignorée dans les dernières décennies, est de plus en plus utilisée dans la vie sociale. Ainsi, dans les zones berbérophones, les fonctionnaires marocains peuvent – ce n'est pas obligatoire – communiquer en l'une ou l'autre des langues berbères, notamment en tachelhit, en tamazight ou en tarifit. Évidemment, les associations berbères ne dépendent pas de la politique gouvernementale, mais elles peuvent influencer celle-ci par des moyens de pression.

Au nombre de ces associations, mentionnons l'Association Tafsut (Agadir), L'Association Recherche culturelle et éducative (Agadir), l'Association Douar Aourir (Agadir), l'Association Tiwitza tagadirt aabadu (Agadir), l'Association culturelle Azekka (Azilal), l'Association Tamesna (Casablanca), l'Association culturelle Souss (Casablanca), l'Association Tizi (El Hajeb), l'Assosiation Tidukla (El Jadida), l'Association Asafar (Errachidia), l'Association culturelle Asirem (Errachidia), etc.; il y en a des dizaines du genre.  Beaucoup d'associations ont leur siège sociale en France: le Mouvement culturel Berbère-France, le Collectif culturel berbère, l'Annuaire berbère, Asaru, l'Union des femmes pour la culture berbère,  Espace franco-berbère de Creteil-Azul, Arbalou à la rencontre des Berbères de l'Atlas, l'Association des chrétiens originaires de Kabylie et leurs amis, la Fédération des associations berbères, la Maison de Kabylie, le Mouvement culturel berbère, l'Association Tamazgha, l'Association berbère de Montréal, l'Assocation socioculturelle «Le printemps amazigh», etc. Il existe également des associations berbères dans d'autres pays.

5.2 Le système éducatif

En 1995, grâce à l'aide de la Banque mondiale, le gouvernement marocain avait formé une commission pour travailler à la réforme de l'ensemble du système éducatif et évaluer la possibilité d'enseigner le berbère dans les écoles. Toutefois, la commission n'a jamais fait appel à des spécialistes berbères et a même recommandé le maintien de l'arabisation totale de l'enseignement. C'est pourquoi, jusqu'à récemment, l'enseignement du berbère demeurait interdit. Certains spécialistes marocains, tant arabophones que berbérophones, affirment que, de toute façon, il y aurait pénurie de maîtres formés à cet enseignement et qu'il n'existe pas de matériel pédagogique en berbère. Néanmoins, en mars 2003, l'Institut royal de la culture amazighe et le ministre de l'Éducation nationale se sont entendus pour définir le cadre général de coopération entre les deux institutions et la signature d'une entente globale concernant l'intégration de l'amazighe dans le système éducatif. Une commission mixte, chargée de traiter les aspects éducatifs et techniques de la question, a été également instituée. Suite à ces ententes, plusieurs mesures ont été prises. Citons les suivantes: 

- commencer l'enseignement de l'amazighe dans la première année de l'enseignement primaire à partir de septembre 2003, au sein d'un échantillon d'écoles, dans la perspective de son introduction;

- préparer un plan de formation fixant les programmes et les méthodes d'encadrement à l'intention des enseignants, des directeurs et des inspecteurs;

- préparer le programme de l'amazighe pour les différents niveaux et cycles éducatifs;

- réaliser une étude de terrain dans les écoles, faisant partie de l'échantillon, qui commenceront à enseigner l'amazighe, dans le but de définir les compétences des enseignants, leurs besoins et leur degré de motivation;

- préparer les outils didactiques nécessaires à la réalisation d'un enseignement moderne pour l'amazighe.

5.3 L'écriture tifinague

Par ailleurs, Sa Majesté le roi Mohammed VI a donné son approbation à la proposition de l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) concernant l'adoption de la graphie tifinaghe (tifinak ou tifinar) pour l'enseignement de l'amazighe dans ses trois variétés (tarifit, tamazight et tachelhit). C'est en février 2003 que le Conseil d'administration de l'IRCAM a décidé de choisir le tifinaghe parmi trois types d'alphabets candidats (le tifinaghe, le latin et l'arabe) comme graphie à adopter pour enseigner l'amazighe dans les écoles primaires. Accueilli positivement par la majorité écrasante des composantes du Mouvement culturel amazighe, ce choix semble avoir mis fin à un débat houleux et polémique visant «à priver la langue amazighe de sa propre écriture».

L'alphabet tifinaghe comportera 33 lettres et ne représentera aucune des données phoniques d'aucun parler particulier (tarifit, tamazight et tachelhit), car il est conçu pour écrire l'amazighe standard. La particularité de cet alphabet est de neutraliser dans la langue écrite les traits phonétiques à caractère. Le sens de la lecture et l'écriture tifinaghe est orienté vers la droite. En ce qui a trait à cet alphabet, on peut visiter le site de Monde berbère.com en cliquant ICI, s.v.p.

Toutefois, les Berbères ne sont pas tous d'accord sur la graphie tifinaghe, laquelle est à base d'alphabet arabe. Ainsi, l'Association tamazgha accuse l'IRCAM de «complot visant à freiner l'usage de la graphie gréco-latine largement diffusée». Il s'agirait d'une «stratégie pour propulser l'usage de la graphie arabe, en vue de l'imposer par l'usage». Dans un contexte où l'arabisation est une affaire d'État et où l'amazighe a longtemps été combattu par l'État, l'usage de la graphie arabe jouerait en faveur de l'arabisation. Pour l'Association Tamazgha, il ne faudrait pas voir dans l'adoption de la graphie tifinaghe un geste en faveur de l'amazighe. Rappelons que l'écriture tifinaghe est vieux de trois mille ans et qu'il a été utilisé pour des besoins décoratifs et artistiques en Égypte, au Niger, au Mali, au Burkina Faso et aux îles Canaries.

5.4 Les médias

Pour ce qui est de la radio et de la télévision, l'État marocain diffuse quelques émissions dans trois langues berbères: en tachelhit, en tamazight et en tarifit. Dans l'affichage, le berbère n'est évidemment jamais employé, et ce, d'autant plus qu'il n'est pas considéré comme une langue écrite. Même les textes législatifs adoptés par le Parlement marocain ne font jamais mention de la langue berbère. Dans les circonstances présentes, on ne voit pas comment la reconnaissance politique et juridique du berbère peut se concrétiser. De plus, ni les instances administratives concernées ni les premiers intéressés par la berbérophonie ne se sont engagés dans une mise en oeuvre qui traduise, dans les faits, cette reconnaissance.

5.5 Les noms berbères

Enfin, en 1996, le gouvernement marocain faisait adopter une nouvelle loi (loi du nom de Dahir no 1.96.97) dont le but est d'imposer un règlement sur le choix des noms que tous les citoyens marocains doivent utiliser chez eux et à l'étranger. Cette loi impose une liste officielle de prénoms d'origine marocaine. Or, il appert que ces prénoms d'origine marocaine sont exclusivement arabes et non berbères. La loi marocaine de 1996 contient les dispositions suivantes:

1) Le prénom (de chaque nouveau né) à inscrire au Registre de l'état civil devra être un prénom d'origine marocaine. Ce prénom ne doit pas être d'origine étrangère.

2) Le prénom ne pourra pas faire référence au nom d'une ville, d'un village ou d'une tribu. Il ne devra pas constituer une menace aux coutumes de la société ou à la sécurité nationale.

3) Tous les citoyens marocains vivant en dehors du pays et désirant donner une prénom étranger doivent demander l'autorisation aux autorités compétentes. Tous les changements de prénoms (d'un prénom d'origine marocaine) devront être approuvés par ces mêmes autorités.

Instituée pour préserver apparemment la culture marocaine, la loi impose en réalité des noms arabes à tout un ensemble de citoyens dont plus du quart n'est pas arabophone mais berbérophone. Évidemment, les associations culturelles berbères ont vivement protesté contre cette loi et ont dénoncé l'injustice flagrante imposée à la culture berbère, car la loi force les berbérophones à n'utiliser que des prénoms arabes approuvés par le gouvernement marocain.

On aurait intérêt à consulter la Charte d'Agadir relative aux droits linguistiques et culturels. Cette charte est le fruit d'une réflexion collective qui a marqué ce débat; elle se propose comme une contribution au projet global de l'édification de la culture nationale démocratique.

Le Maroc qui avait commencé en lion sa politique linguistique d'arabisation a mis la pédale douce après une dizaine d'années d'efforts. D'abord, le secteur prioritaire, l'enseignement primaire et secondaire, a été entièrement arabisé, et le français a retrouvé une place non négligeable, celle d'une langue seconde très importante, obligatoire, voire indispensable.

L'administration du pays a continué à utiliser le français comme elle l'avait toujours fait auparavant, sauf qu'elle distribue maintenant des documents en un arabe classique dont personne ne veut. Le Parlement respecte le caractère symbolique de l'arabe classique en son sein, sans que cela ne dérange beaucoup de monde dans le pays, sauf les berbérophones. La vie continue comme avant l'indépendance, sauf que l'arabe prend une place qu'il n'avait pas auparavant.

Les Berbères, dont la langue est encore presque ignorée, sont toujours francophiles parce que le français ne leur nuit pas, contrairement à l'arabe. La politique linguistique actuelle du Maroc, qui ressemble fort à celle de la Tunisie, semble néanmoins satisfaire tout le monde à l'exception des Berbères qui protestent, parfois faiblement: elle consiste à promouvoir l'arabe, sans nuire au français et à ignorer le berbère, la langue de la minorité marocaine.

La reconnaissance de l'arabité constitue l'essentiel de l'identité marocaine. Il semble que le Maroc a davantage réussi à concilier l'apport du français que celui du berbère. Pourtant, le pluralisme culturel dont fait preuve le Maroc relèverait davantage d'une triple identité, à la fois arabo-musulmane, franco-occidentale et berbère. Or, ce dernier aspect n'a pas encore été assumé par les Marocains, qu'ils soient arabophones ou berbérophones. Le problème est identique en Algérie.

Depuis le «printemps berbère» de 1980, la cause de la berbérophonie n'a pas évolué beaucoup au plan politico-juridique. Il semble y avoir une sorte d'incapacité chronique de l'État marocain à intégrer la dimension berbère. Non seulement peut-on y voir là deux forces sociales – l'une arabe, l'autre berbère –, mais aussi une situation potentiellement porteuse d'un conflit majeur susceptible de déboucher sur reconfiguration profonde des données géopolitiques, idéologiques et culturelles dans tout le Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie). Pour le moment, il semble que tous les États se soient donné le mot pour ignorer les droits linguistiques de toutes les minorités berbérophones. Cependant, cette politique est appelée à changer au Maroc, car le gouvernement a décider de libéraliser sa politique linguistique et de laisser davantage de place à l'amazighe, notamment en éducation et dans les médias.

Dernière mise à jour: 23 mars 2008

Bibliographie

ABOUZAID, Myriam. «L'aménagement de la langue amazighe au Marco: enjeux et réception auprès des enseignants», Grenoble, mémoire de DEA (master2), Université Stendhal, Grenoble III, juin 2005.

BOUKOUS A. «La politique linguistique au Maroc : enjeux et ambivalences» dans Les politiques linguistiques, mythes ou réalités, Paris, C. Juillard et L-J. Calvet (dir.), Éditions AUPELF-UREF, 1998, p. 63-72.

BOUNFOUR, Abdallah. «Où en est le berbère au Maroc?» dans Langues et littératures berbères, Paris, L'Harmattan, coll. "Chroniques des études", no 13, 1996.

ENCYCLOPÉDIE MICROSOFT ENCARTA, 2004, art. «Maroc», pour la partie historique.

GRANDGUILLAUME, Gilbert. Arabisation et politique linguistique au Maghreb, Paris, Éditions G.-P. Maisonneuve et Larose, 1983, p. 127.

LECLERC, Jacques. Langue et société, Laval, Mondia Éditeur, coll. "Synthèse", 1992, 708 p.

LECLERC, Jacques et Jacques MAURAIS. Recueil des législations linguistiques dans le monde, tome V: «Algérie, Autriche, Chine, Danemark, Finlande, Hongrie, Malte, Maroc, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Tunisie, Turquie, ex-URSS», Québec, Les Presses de l'Université Laval, CIRAL, 1994, 223 p.

MEN (Ministère de l'Éducation nationale). Charte de l'Éducation et de la Formation, 1999, consultable sur la page : http://www.cosef.ac.ma/charte/partie_2/espace3.htm.

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RUITER, J.J. «Le profil sociolinguistique des élèves arabophones et berbérophones dans l'enseignement primaire au Maroc», dans Revue Awal, Cahier d'etudes berbères, no 19, Paris, 1999, p. 33-42.

QUITOUT, Michel. «L'arabe, le français, l'amazighe au Maroc: un patrimoine culturel nationale» dans Cahiers du Rifal, Agence de la francophonie et Communauté française de Belgique, no 22, décembre 2001, p. 60-65. 

ROSSILLON, Philippe (sous la direction de). Atlas de la langue française, Paris, Bordas, 1995, 127 p.

Accueil: aménagement linguistique dans le monde

Musiques arabes cliquer ci-dessous sur le lien

http://www.topdumaroc.com/sites-maroc-1214-telecharger-musique.html.

 



30/03/2008
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